L’extension de la terrasse d’une brasserie peut justifier le déplafonnement du loyer du bail commercial renouvelé

par Bastien BRIGNON - Maître de conférences à l’Université d’Aix-Marseille
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Immobilier : terrasse de brasserieL’essentiel

Article paru dans les Annales des Loyers N° 12 de décembre 2021

L’agrandissement de la terrasse extérieure d’une brasserie sur le domaine public, n’affecte pas les caractéristiques des locaux loués mais peut constituer une modification notable des facteurs locaux de commercialité justifiant un déplafonnement du loyer.

Cass. 3e civ., 13 octobre 2021, n° 20-12.901, publié au bulletin

Le commentaire

Cet arrêt apporte une précision inédite, à savoir qu’une autorisation administrative portant sur l’installation d’une terrasse d’un restaurant sur le domaine public ou sur l’agrandissement de cette terrasse peut constituer une modification des facteurs locaux de commercialité. Cette solution est d’autant plus importante que, dans le contexte actuel de crise sanitaire, et de la mise en place des gestes barrières pour lutter contre l’épidémie de coronavirus, les terrasses des restaurants et brasserie ont tendance soit à être créées, lorsqu’elles n’existaient pas, soit à être étendues lorsqu’elles existaient déjà. Ces terrasses sont situées, la plupart du temps, sur le domaine public. Une autorisation de l’autorité administrative est par conséquent requise, moyennant le versement d’une redevance. La question est alors de savoir si cette terrasse, agrandie, ne pourrait pas justifier le déplafonnement du loyer au moment du renouvellement du bail commercial, en raison de l’augmentation du chiffre d’affaires qu’elle permet de générer.

Telle était précisément en l’espèce l’argumentation du bailleur qui, arguant du bénéfice tiré par son preneur de la terrasse octroyée par l’administration, lui permettant de tirer ainsi un meilleur profit de son commerce, invoquait tant la modification des caractéristiques des locaux loués au visa de l’article R. 145-3 du Code de commerce que la modification des facteurs locaux de commercialité, comme double motif de déplafonnement.

Autant la cour d’appel l’a débouté, sur le premier point, en estimant que cette extension ne pouvait être retenue comme une modification des caractéristiques des lieux loués dès lors que la terrasse ne faisait pas partie de ceux-ci, et le moyen dont la Cour de cassation était saisie à cet égard a été rejeté (I), autant il obtient, sur le second point, la censure de l’arrêt d’appel au visa des articles L. 145-33, L. 145-34 et R. 145-6 du Code de commerce car le juge du fond aurait dû, ainsi qu’il y était invité, rechercher si l’extension du commerce du preneur à la faveur de cette terrasse, modifiait les facteurs locaux de commercialité et constituait par là-même un motif de déplafonnement, recherche à laquelle il n’avait pas procéder, d’où la cassation (II).