[2018-09] - Le recours à l’administrateur provisoire (NL)

par Florence TULIER POLGE - Administrateur judiciaire
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La procédure d’administration provisoire s’impose dès lors qu’une personne physique ou morale se trouve mise dans l’impossibilité de gérer et d’administrer tout ou partie de son patrimoine, qui peut comprendre une entreprise ou un immeuble, et consiste à lui substituer une personne désignée par l’autorité judiciaire.
Déclenchée dans le cadre d’un référé ou sur requête, elle apparaît particulièrement bien adaptée aux situations d’urgence affectant l’immeuble. Elle est fréquemment utilisée lorsque la situation de l’immeuble nécessite des mesures immédiates.

*Chronique issue des actes du colloque ''L'urgence et l'immeuble'' - 1er juin 2018 - Aix en Provence


I.- Les principales caractéristiques de la procédure d'administration provisoire

A.- Une procédure par nature judiciaire

Rappelons que l’administration provisoire consiste, dans le cadre d’une décision judiciaire, à confier dans l’urgence, temporairement, et à titre exceptionnel à un tiers sachant, l’administration d’un bien ou d’une personne morale.
Plusieurs textes la prévoient expressément, notamment en matière d’indivision, de succession vacante ou non réclamée ou d’administration du syndicat des copropriétaires, mais il s’agit en fait d’une construction prétorienne des juges pour faire face à certaines situations de vacance des organes d’administration ou de gestion des biens.
La compétence appartient au président du tribunal de grande instance en matière immobilière, mais pas forcément si l’immeuble est détenu par une société commerciale. Le juge apprécie souverainement les conditions d’ouverture, en fonction des circonstances de la cause.

B.- Une mesure exceptionnelle

L’administration provisoire est, par nature, exceptionnelle, et ne peut intervenir que si la démonstration a été faite par le demandeur que les solutions mises en place par le droit commun se sont révélées vaines ou inefficaces.
Il faudra ainsi démontrer que le bien n’est pas administré, ou que la SCI détentrice de l’immeuble ne dispose plus de gérant, ou que celui-ci n’exerce pas ces fonctions correctement, par exemple, et que cette vacance entraîne un risque pour le bien, ses détenteurs, ou les tiers.
Les motifs de l’ouverture de la procédure pourront être, notamment, la mise en péril du patrimoine de l’indivision ou des intérêts de l’un des indivisaires, les risques pour les créanciers de perdre leur gage, ou une situation où la conservation ou l’exploitation du bien sont mis en péril ou compromis.

C.- Une procédure motivée par l’urgence

Du fait de son caractère exorbitant, elle ne peut intervenir que parce qu’il y a urgence à préserver le bien et à sauvegarder l’intérêt de son propriétaire, et les textes applicables en la matière y font d’ailleurs presque tous référence.
Ainsi, en matière d’indivision, l’article 815-6 du Code civil1 prévoit que le président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés, peut prescrire toutes mesures urgentes que requiert l’intérêt de l’indivision.

On utilisera la procédure de référé de l’article 808 : «Dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal de grande instance peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifient l’existence d’un différend».
On invoquera aussi l’article 812 du Code de procédure civile (CPC) : «le président peut ordonner sur requête toute mesure urgente lorsque les circonstances exigent qu’elles ne soient pas prises contradictoirement.»2

D.- Une procédure temporaire

Par définition, l’administration provisoire ne peut durer. Déclenchée en dernier recours, elle vise à restaurer à terme les conditions d’une administration normale du bien, c’est-à-dire à ramener le bien sous la gestion et la responsabilité de ses [...].

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