[2018-09] - Les référés administratifs d’urgence et l’immeuble* (NL)

par Guillaume MERLAND - Avocat au barreau de Montpellier & Vincent BALP - géomètre-expert
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Index de l'article

 I.- Le référé-suspension et l'immeuble

Le référé-suspension est régi par les dispositions de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative aux termes duquel :
«Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. Lorsque la suspension est prononcée, il est statué sur la requête en annulation ou en réformation de la décision dans les meilleurs délais. La suspension prend fin au plus tard lorsqu’il est statué sur la requête en annulation ou en réformation de la décision».

La finalité de ce référé est de suspendre l’exécution d’une décision administrative sur laquelle pèse un sérieux doute quant à sa légalité.
A ce titre, pour que le juge administratif prononce la suspension de l’acte, deux conditions doivent être réunies : il doit y avoir une urgence et un doute sérieux quant à la légalité de l’acte administratif

La Conseil d’Etat a défini le sens de la condition d’urgence dans un arrêt de section «Confédération nationale des radios libres» en date du 19 janvier 2001 :
«La condition d’urgence à laquelle est subordonné le prononcé d’une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision administrative contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre ; il en va ainsi, alors même que cette décision n’aurait un objet ou des répercussions que purement financiers et que, en cas d’annulation, ses effets pourraient être effacés par une réparation pécuniaire».

En matière immobilière et dès lors qu’il vise avant tout la suspension d’une décision prise par l’administration, le référé-suspension trouve à s’appliquer essentiellement dans le droit de l’urbanisme. Plus particulièrement, si les requérants l’invoquent à l’encontre d’arrêtés interruptifs de travaux, la jurisprudence révèle une application privilégiée en matière de recours contre les autorisations d’occupation des sols (pour l’essentiel, permis de construire, permis de démolir, permis d’aménager, déclaration préalable) (A) et contre les décisions de préemption (B).

A.- L’urgence et les autorisations d'occupation des sols

Le juge administratif saisit d’une requête en référé-suspension n’appréhende pas la condition d’urgence de la même manière selon que le litige porte sur la délivrance d’une autorisation d’urbanisme ou son refus.

• L’appréciation de la condition d’urgence dans le cadre de la délivrance d’une autorisation d’urbanisme

Pour que le juge administratif retienne l’urgence à suspendre une décision administrative accordant une autorisation d’occupation des sols, il faut avant tout que le requérant apporte des éléments tangibles permettant au juge d’apprécier la portée et gravité des intérêts lésés.

Toutefois, dans ce domaine, l’urgence est souvent présumée : dès lors que la construction d’un [...].

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