[ENVIRONNEMENT] Veille.- Rapport.- Inondations

par Guilhem GIL, Maître de conférences à Aix-Marseille Université
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J.-Y. Roux et J.-F. Rapin, Mission conjointe de contrôle, relative aux inondations survenues en 2023 et au début de l’année 2024,  (Sénat, rapp. n° 775), 25 septembre 2024.

A l’issue de huit mois de travaux, la commission des finances et la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat ont publié un rapport d’information relatif aux inondations survenues en 2023 et au début de l’année 2024. Destiné à dresser un état des lieux des politiques de prévention des inondations et de gestion de crise et d’après-crise, le document souligne la pluralité des aléas liés aux inondations, les facteurs physiques et météorologiques dominant ces phénomènes étant fréquemment aggravés par des facteurs humains tels que l’artificialisation des sols, la destruction d’espaces naturels ou encore la mauvaise gestion des cours d’eau. Concernant déjà plus d’un habitant sur quatre, la sinistralité relative aux inondations par débordement pourrait connaître, sur l’ensemble du territoire, une progression située entre 6 % et 19 % à l’horizon 2050. L’évolution de la sinistralité relative aux submersions marines serait encore plus marquée : la hausse se situerait entre 75 % et 91 % par rapport au climat actuel.  Outre l’appel à une diffusion plus large de la culture du risque dans les territoires, le rapport invite également à une simplification de la gestion des cours d’eau, dont l’entretien relève selon les auteurs du document d’un maquis règlementaire dont les effets néfastes sont renforcés par la longueur des procédures administratives préalables qui nuit souvent à une intervention rapide dans les cours d’eau. Les modalités de financement des actions sont également à revoir, la taxe dite Gemapi n’étant pas considérée par les rapporteurs comme un instrument à la hauteur des enjeux pour les collectivités et le transfert des digues domaniales de l’État aux EPCI, engagé depuis 2024, n’ayant pas fait l’objet d’un accompagnement suffisant de la part de l’État. Il est alors préconisé la mise en place d’un fonds de péréquation entre les collectivités en amont, qui supportent généralement l’essentiel de la charge des travaux alors qu’elles ont les ressources les plus faibles, et les collectivités en aval, ayant moins de travaux à réaliser et ayant souvent des moyens financiers plus importants. En outre, il est également suggéré, face au risque d’intensification des inondations, de mieux maîtriser l’urbanisation en zone inondable et à y adapter les modes de construction. Dans cette perspective, le recours à des techniques de construction et d’aménagement résilientes en zone inondable apparaît indispensable. Enfin, il est déploré que la gestion de l’après-crise demeure l’angle mort de la lutte contre les inondations. Particulièrement longue et difficile pour les petites communes qui ne disposent pas de moyens suffisants et se trouvent confrontées à la dichotomie administrative entre les travaux d’urgence temporaires – sans procédure administrative préalable – et les travaux structurants de reconstruction, soumis à la procédure de droit commun qui peut s’avérer longue, cette phase est également délicate pour les particuliers ou les entreprises confrontés au versement tardif des indemnités, ce phénomène récurrent trouvant en grande partie sa cause dans la durée des expertises d’assurance. De surcroît, les rapporteurs soulignent, alors même qu’il n’existe pas de principe général d’obligation de reconstruction à l’identique en droit, que des personnes sinistrées ont régulièrement été contraintes d’utiliser leurs primes d’assurance pour effectuer des reconstructions à l’identique, alors même que le bien endommagé aurait pu être amélioré, que ce soit au niveau de la prévention des risques naturels ou de l’efficacité énergétique. Bien qu’étant la solution la plus simple à mettre en œuvre, à la fois en termes juridiques et financiers, la reconstruction à l’identique constitue potentiellement ce qui est qualifié par les rapporteurs de véritable gâchis. Ils recommandent alors de favoriser l’utilisation des indemnités d’assurance pour reconstruire de manière résiliente et, d’une manière générale, préconisent de généraliser, à terme, l’expérimentation «Mieux reconstruire après inondation», dont l’échéance est prévue en 2026. Par ailleurs, pour remédier aux difficultés à renégocier leur contrat d’assurance parfois rencontrées par les sinistrés, il est proposé d’étendre la compétence du Bureau central de tarification (BCT) à la renégociation des contrats d’assurance.