[BAIL] Rapport.- Expulsions locatives

par Guilhem GIL, Maître de conférences à Aix-Marseille Université
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Cour des comptes, La prévention des expulsions locatives, 19 décembre 2022

Appelée à se pencher sur la prévention des expulsions locatives, la Cour des comptes a tout d’abord souligné la difficulté à évaluer ce phénomène. Au travers du prisme du contentieux de l’expulsion, il apparaît que sur la période 2016-2019, ce contentieux a diminué de 18,5 %, avec 150 000 assignations en 2019, dernière année connue, contre près de 180 000 en 2016. Néanmoins, cette réduction n’est pas allée de pair avec une baisse du nombre des décisions d’expulsion ferme : un peu plus de 52 000 en 2019, soit un niveau quasiment égal à celui de 2016. Avec 95 % des assignations contentieuses, ce sont les impayés qui demeurent la principale cause des risques d'expulsion.

La Cour constate que le pilotage national en matière de prévention s'avère limité. Si la délégation interministérielle à l’hébergement et de l’accès au logement (DIHAL) est devenue compétente sur ce sujet depuis 2016, sa montée en puissance a été progressive et son action n’est visible que depuis 2020. Sur le plan opérationnel, l'action de prévention des expulsions repose sur une coordination locale délicate et dotée de moyens réduits.

La Cour estime que, bien que renforcés durant la crise sanitaire, les services de l’État chargés de la prévention de ces expulsions n’en demeurent pas moins confrontés à des difficultés opérationnelles qui restreignent leur rôle et rendent leur action difficilement évaluable. Depuis la loi ALUR de 2014, la prévention des expulsions vise avant tout au maintien de l’occupant dans le logement. Le cadre législatif et réglementaire a notamment évolué afin de renforcer les résolutions amiables et faciliter la coordination des leviers d’action. Toutefois, selon la Cour, l’absence de politique spécifique de relogement ou d’hébergement, comme la réalité des situations individuelles et des contingents préfectoraux de logements disponibles rendent ardue la mise en cohérence de l’action publique.

La Cour formule alors sept recommandations et notamment celles de mettre en œuvre un suivi spécifique des bénéficiaires du DALO ayant été l’objet d’une expulsion par concours de la force publique (recommandation n° 5) et de prendre en compte, dans le cadre du plan Logement d’abord, dès la phase de prévention des expulsions, les besoins de logement et d’hébergement des ménages de bonne foi dont l’expulsion est inévitable (recommandation n° 6).