[FISCALITE] - Réponse ministérielle.- Usufruits successifs.- Restitution de droits de mutation

par Guilhem GIL - Maître de conférences à Aix-Marseille Université
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Rép. minist. n° 26892, JOAN Q du 2 juin 2020, p. 3863.

Interrogée sur le champ d'application de la demande en restitution de droits de mutation à titre gratuit dans le cas d'usufruits successifs, et plus particulièrement sur le point de savoir si la succession du donateur décédé bénéficie de ce droit à restitution, la ministre de la justice a, sous réserve de l’avis de la DGFIP, indiqué que l'article 1965 B du CGI admet que «dans le cas d'usufruits successifs, l'usufruit éventuel venant à s'ouvrir, le nu-propriétaire a droit à la restitution d'une somme égale à ce qu'il aurait payé en moins si le droit acquitté par lui avait été calculé d'après l'âge de l'usufruitier éventuel». Ce droit à restitution peut notamment se rencontrer dans le cas d'une donation par un parent à son enfant de la nue-propriété d'un bien. Le donateur se réserve ainsi l'usufruit du bien et prévoit que cet usufruit sera reversé au profit, par exemple, de son conjoint, plus jeune, au jour de son décès. Des usufruits successifs sont ainsi constitués : il portera d'abord sur la tête du donateur, puis sur la tête du conjoint survivant. Il appartient en principe au donataire, à savoir le nu-propriétaire, de payer les droits de mutation à titre gratuit. Ces droits sont calculés par rapport à la valeur de la nue-propriété au moment de la donation. Celle-ci est évaluée selon le barême fiscal établi par l'article 669 du CGI, duquel il ressort que plus l'usufruitier est âgé, plus la valeur de la nue-propriété, et donc, la taxation, est importante. Dans l'hypothèse d'usufruits successifs au profit d'un usufruitier plus âgé que l'usufruitier en second, le nu-propriétaire, qui a payé les droits de mutation à titre gratuit au moment de la donation, se trouve par conséquent surtaxé. Il supporte en effet un deuxième usufruit au décès du donateur. Or, cet usufruit étant constitué au profit d'une personne plus jeune, la valeur de la nue-propriété est diminuée. L'article 1965 B du CGI admet en conséquence que, lorsque ce second usufruit s'ouvre, le nu-propriétaire a droit à la restitution d'une somme égale à ce qu'il aurait payé en moins si les droits avaient été calculés d'après l'âge du nouvel usufruitier au jour du décès du constituant qui est à l'origine des usufruits successifs. (V. BOI-ENR-DG-70-40, 12 sept. 2012, § 1). Ce droit à restitution n'est toutefois accordé que si le nu-propriétaire a acquitté les droits de mutation à titre gratuit. La restitution n'est en effet justifiée que si le nu-propriétaire a souffert d'une surtaxation, ce qui n'est pas le cas lorsqu'il n'a pas acquitté les droits de mutation. La succession du donateur décédé ne peut pas non plus bénéficier de cette restitution. La lettre du texte l'en empêche : seul le nu-propriétaire a droit à la restitution d'après l'article 1965 B CGI.