CA Paris, 5-3, 27 mars 2025, n° 22/13880
Article paru dans les Annales des Loyers N° 06 de Juin 2025
Une demande de renouvellement a été formulée en date du 24 novembre 2015, à laquelle le bailleur est resté silencieux. Conformément à l’alinéa 4 de l’article L. 145-10 du Code de commerce, le bail s’est renouvelé pour une durée de neuf ans à compter du 1er janvier 2016. La bailleresse a ensuite donné congé à compter du 31 décembre 2018, terme de la période triennale en cours, en indiquant, sur la base de l'article L. 145-18 du Code de commerce, son intention de procéder à une opération de démolition-reconstruction. Cependant, le congé ne précisait pas les détails de cette opération. En conséquence, la locataire a assigné la bailleresse devant le tribunal judiciaire de Paris pour obtenir l'annulation du congé. La cour d’appel a confirmé le jugement annulant le congé avec refus de renouvellement en se fondant sur le principe selon lequel le droit de reprise du bailleur, tel que prévu à l'article L. 145-18 du Code de commerce, ne s'applique pas en cas de reconstruction partielle de l'immeuble loué, ni pour des travaux d’aménagement, de transformation ou de réparation des locaux. La mise en œuvre de cette reprise exige que les travaux aient la qualification de travaux de construction ou de reconstruction, ce qui implique que les travaux envisagés rendent le local inexploitable par le locataire. Il est également essentiel qu’à la date du congé, le bailleur ait l'intention de démolir l'immeuble pour le reconstruire. En l’espèce, bien que le congé délivré visait l'article L. 145-18 sans autre précision sur l’opération de démolition-construction, un permis de construire a été communiqué postérieurement à la locataire. Néanmoins, ce permis, émis par la mairie, indiquait que les travaux projetés par la bailleresse ne constituaient pas des travaux de démolition-reconstruction au sens de l'article L. 145-18, dans la mesure où ils ne nécessitaient pas la démolition totale de l'immeuble dont dépendaient les locaux loués, mais consistaient principalement en des travaux de rénovation. En conséquence, le seul congé qui aurait pu être valide aurait été un congé de droit commun avec offre d'indemnité à l'expiration du bail. En effet, si le bailleur peut donner congé à son locataire, à l'expiration d'une période triennale, pour construire ou reconstruire l'immeuble existant, à charge de payer au locataire évincé l'indemnité d'éviction prévue à l'article L. 145-14 du même code, il peut en revanche se soustraire au paiement de l’indemnité d’éviction en offrant au locataire évincé un local de remplacement correspondant à ses besoins et possibilités, situé à un emplacement équivalent. En l’occurrence, les travaux n’étaient pas de nature à être qualifiés de démolition-reconstruction ; ils ne permettaient donc pas au bailleur de donner congé en cours de bail. Par ailleurs, les juges du fond rappellent qu’il est établi que le commandement visant la clause résolutoire est dépourvu d'effet s'il est imprécis au point de ne pas permettre au locataire d'être clairement informé des manquements contractuels qui lui sont reprochés et des mesures précises qu'il doit prendre dans le délai légal d'un mois pour y remédier.