[PROFESSIONS] - Officiers publics et ministériels : limite d’âge et modalités de recours au tirage au sort.

par Guilhem GIL - Maître de conférences Aix-Marseille Université
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CE, ass., 18 mai 2018, n° 400675.

Le Conseil avait été saisi d’une demande d’annulation du décret du 20 mai 2016 relatif aux officiers publics et ministériels. Le Conseil d’État, réuni en formation solennelle d’Assemblée du contentieux, rejette les différentes requêtes formées à l’encontre du décret du 20 mai 2016. S’agissant en particulier du mode de départage des demandes de nomination aux nouveaux offices notariaux créés dans les zones d’installation libre, le Conseil d’État pose le principe suivant lequel si aucun texte ni aucun principe ne fait obstacle à ce que le pouvoir règlementaire puisse prévoir, dans certains cas, de faire reposer sur le tirage au sort le départage entre des demandes adressées à l’administration lorsque le législateur n’en a pas décidé lui-même, c’est à la condition que ce mode de départage, par lequel l’autorité compétente ne peut exercer le pouvoir d’appréciation qui est en principe le sien, soit en adéquation avec l’objet de ces demandes ou les circonstances de l’espèce et conforme aux intérêts dont elle a la charge. En l’espèce, le Conseil d’État en a déduit que le décret attaqué, qui s’est borné à prévoir par le recours au tirage au sort, un mécanisme de départage entre des demandeurs disposant d’un égal droit à être nommé en vertu de la loi, n’est pas entaché d’illégalité. Concernant la limite d’âge à 70 ans fixée pour les notaires, les huissiers de justice et les commissaires-priseurs judiciaires, le Conseil d’État rappelle, d’abord,  que le Conseil constitutionnel a déclaré cette limite conforme à la Constitution par sa décision n° 2015-715 DC du 5 août 2015. Jugeant de la conformité de cette règle avec le droit de l’Union européenne et le droit de la Convention européenne des droits de l’homme, le Conseil d’État estime, ensuite, que le législateur a poursuivi un objectif légitime tenant au renouvellement de ces professions et à une meilleure ouverture de leur accès à de jeunes professionnels. Il constate que cette limite, assortie d’une possibilité de prolonger l’activité pendant une période maximale de douze mois, est supérieure à celle de la plupart des législations comparables et à l’âge effectif auquel la plupart de ces professionnels cessent en pratique leur activité. Le Conseil d’État rappelle notamment que les professionnels conservent la possibilité, en cas de préjudice grave et spécial résultant de l’application de la limite d’âge instaurée par la loi, d’en demander réparation à l’État sur le fondement du principe constitutionnel d’égalité devant les charges publiques. Il en conclut que la mesure attaquée ne méconnaît ni le droit de l’Union européenne ni la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.