[2017-12] - Rente immobilière et réorientation de la politique du logement.

par Guilhem GIL, Maître de conférences à Aix-Marseille Université
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Le 8 novembre 2017, la Commission des finances du Sénat a publié un rapport (n° 75) intitulé «La “rente immobilière” : mythe et réalités».

Ce rapport fait le constat selon lequel l’immobilier ne présente pas une rentabilité avant impôts anormalement élevée. Sur longue période, l’immobilier présente des niveaux de rentabilité et de volatilité intermédiaires entre les actions et les obligations, une fois les charges pesant sur les propriétaires prises en compte.  En France, la rentabilité avant impôts de l’immobilier s’est fortement réduite depuis la fin des années 2000, pour se rapprocher de celle observée dans les autres pays européens et la fiscalité française n’apparaît pas particulièrement biaisée en faveur de l’immobilier, une fois les spécificités liées au statut de propriétaire occupant prises en compte. Selon le rapport, le niveau de prélèvements est particulièrement élevé (67,9 milliards d’euros de prélèvements liés au logement) et les comparaisons internationales mettent en évidence l’importance des prélèvements opérés sur le patrimoine immobilier en France dès lors que l’imposition du patrimoine immobilier intervient à chaque stade du cycle économique, de l’acquisition à la cession en passant par la détention du bien. Quant à l’investissement locatif, les comparaisons avec la fiscalité mobilière ne confirment pas l’existence d’un biais fiscal en faveur de l’immobilier. Le rapport souligne également que l’immobilier contribue à la croissance de l’économie réelle et constitue un des moteurs de la croissance française, même si les gains de productivité y sont plus faibles que dans le reste de l’économie. La hausse des prix de l’immobilier ne s’est pas traduite par une déformation de la structure de l’économie française vers la construction et la dynamique du crédit immobilier ne semble pas exercer d’effet d’éviction sur le financement des entreprises. S’agissant de l’évolution des inégalités, la hausse des prix de l’immobilier exerce des effets contrastés. La hausse des prix de l’immobilier a permis de réduire la concentration des richesses, compte tenu du poids du logement dans le patrimoine des «classes moyennes» mais un renforcement préoccupant des inégalités d’accès à la propriété, en partie liée à l’inflation immobilière, peut néanmoins être observé. Afin de réorienter la politique du logement, le rapport propose d’infléchir la rétention foncière,  d’inciter les collectivités territoriales à rendre les terrains constructibles et de poursuivre la rationalisation des normes pour faciliter la construction neuve en zone tendue ; de faciliter l’accès à la propriété des jeunes générations et des ménages modestes ; de trouver un meilleur équilibre entre la mobilisation du parc ancien et la construction neuve pour accroître l’offre et favoriser l’entretien des immeubles ; de limiter certains biais constatés sur les dispositifs d’aide au logement ; de traiter fiscalement l’investissement locatif comme un actif productif ; de garantir une concurrence équitable avec les propriétaires exerçant sur les plateformes d’hébergement en ligne.