[2017-09] - Conflits d’usage en outre-mer - Un foncier disponible rare et sous tension.

par Guilhem GIL, Maître de conférences à Aix-Marseille Université
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Le 6 juillet 2017, la délégation sénatoriale aux outre-mer a publié un rapport d’information (n° 616) qui vient achever la trilogie engagée par les deux premiers volets de l’étude triennale publiés l’un, en juin 2015, sur la gestion des domaines public et privé de l’État et l’autre, en juin 2016, sur la sécurisation des titres fonciers confrontée à la double problématique de l’indivision et du choc entre droit civil et coutume.

Ce troisième rapport d’information propose une analyse du phénomène des conflits d’usage et souligne l’importance de véritables stratégies territoriales sur la base d’outils de planification et de gestion qui se mettent progressivement en place. Il formule dix recommandations qui complètent celles des deux précédents rapports, dont certaines ont déjà connu un début de concrétisation. Sans préjudice des compétences propres de certaines collectivités, il convient d’améliorer la connaissance du fonctionnement des marchés foncier et immobilier dans les outre-mer en mettant en place des dispositifs locaux de collecte et d’agrégation des données ainsi qu’une véritable coordination au niveau central entre le ministère des outre-mer et la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP). Il faut réviser les conditions d’éligibilité à l’aide financière et simplifier les formalités administratives qui font obstacle à la compensation effective de la perte de domicile dans la mise en œuvre de l’article 6 de la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 relative aux quartiers d’habitat informel et à la lutte contre l’habitat indigne dans les départements et régions d’outre-mer. Il faut instituer à Mayotte une commission consultative des baux ruraux et procéder à l’installation effective du tribunal paritaire des baux ruraux. Il convient de créer des groupements fonciers agricoles (GFA) à Mayotte, sur le modèle de ce qui s’est pratiqué aux Antilles, afin d’éviter de laisser en friche les parcelles grevées d’indivision. Il est également envisagé une évolution de la gouvernance de l’établissement public foncier et d’aménagement de Mayotte afin que, lorsque l’établissement aura pris son essor, son président soit élu par ses pairs au sein du conseil d’administration et non plus désigné par décret parmi les représentants de l’État.  En Guyane, il est proposé de procéder à la refonte des procédures d’attribution foncière à des fins agricoles pour raccourcir les délais de traitement des demandes, organiser l’accompagnement des porteurs de projets et favoriser les installations groupées d’agriculteurs. En Guyane encore, il convient de conjoindre aux attributions de foncier agricole sur le domaine privé de l’État l’octroi de parcelles constructibles pour le logement de l’agriculteur et de sa famille. Il faut appliquer au pilotage de l’opération d’intérêt national en Guyane une démarche partenariale associant tant la collectivité (CTG) que les maires, en encadrant sa mise en œuvre par des contrats de territoire tripartites, État-CTG-communes. On doit réactiver le recours à la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers à la Martinique et à La Réunion dans la procédure d’examen des demandes de permis de construire afin d’assurer une meilleure protection de l’intégrité des espaces agricoles. Enfin, à La Réunion, il convient de réaménager la procédure de mise en valeur des terres incultes ou en friche permettant d’imposer à un propriétaire la remise en valeur agricole d’un fonds, par lui-même ou par un tiers exploitant, afin d’en accroître l’efficacité et en particulier de raccourcir les délais d’instruction.