L’importance de la carte professionnelle pour le syndic de copropriété - I.- L’effet de l’absence de carte professionnelle

par Olivier BEDDELEEM, Docteur en droit
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I.- L’effet de l’absence de carte professionnelle

Si le syndic ne dispose pas d’une carte professionnelle, il ne peut pas exercer la fonction de syndic de copropriété et les actes qu’il prendrait comme syndic seraient annulables. 

A.- Une condition d’exercice de la profession

Comme le prévoit l’article 1er de la loi du 2 janvier 1970, l’activité de syndic ne peut être exercée que par un agent immobilier disposant d’une carte professionnelle telle que définie par l’article 3 de la loi. 

Cet arrêt est intéressant en ce qu’il concerne la cession de l’agence et son effet. En l’espèce, un agent immobilier avait obtenu une carte professionnelle délivrée le 29 septembre 2018 et valable jusqu’au 28 septembre 2021. Il avait toutefois cédé son agence le 9 mars 2020 et informé le centre de formalités des professions immobilières avec un maintien des privilèges attachés aux cartes professionnelles jusqu’au 30 décembre 2020. En effet, la carte professionnelle est attachée à la personne de son représentant légal. Comme le rappelle l’article 3 de la loi Hoguet, si la carte est délivrée à une personne morale, il faudra que ses représentants légaux et statutaires justifient de la condition d’aptitude professionnelle, et ne pas être frappés d’une des incapacités ou interdictions d’exercer définies par la loi. 

Si le gérant cède son agence, le nouveau représentant légal doit réaliser les démarches auprès de la CCI pour obtenir une nouvelle carte professionnelle. En effet, comme le prévoit l’article 6 du décret du 20 juillet 1972, tout changement de dénomination ou de forme de la personne morale, de l’identité du ou des représentants légaux ou statutaires et de l’identité du garant ou de l’assureur de la responsabilité civile professionnelle doit faire l’objet d’une déclaration et conduire à la délivrance d’une carte professionnelle mise à jour. 

Or, le nouveau gérant avait entamé les démarches seulement le 31 mai 2021 et obtenu une nouvelle carte le 28 septembre 2021. Le syndic n’était donc pas titulaire d’une carte professionnelle au moment de la convocation de l’assemblée générale, ni au moment de sa tenue le 3 mai 2021. 

B.- Une condition de validité des actes de l’agent immobilier

L’absence de carte professionnelle constitue une infraction pénale, sanctionnée par les articles 14 à 18 de la loi Hoguet. 

Toutefois, cet arrêt démontre qu’il ne faut pas sous-estimer les sanctions civiles. Comme le reconnaissaient les juges, faute de justifier d’une carte professionnelle valide, le mandant du syndic était nul et le professionnel ne pouvait donc pas valablement représenter le syndicat des copropriétaires. Il s’agit d’une nullité de plein droit. 

Cela entraîne deux conséquences. D’une part, la décision d’assemblée générale de nommer un tel syndic est annulable. D’autre part, comme le rappelaient les juges, «les actes accomplis par le syndic dépourvu de carte professionnelle sont annulables : ce syndic ne peut pas valablement agir en justice au nom du syndicat, les assemblées générales qu’il convoque sont irrégulières puisque convoquées par un syndic sans pouvoir, les assemblées pouvant ainsi être annulées si elles font l’objet d’une action en contestation dans le délai légal de 2 mois».

Faute de disposer d’un mandat de syndic valable, le syndic ne pouvait pas non plus exercer les actes permis au syndic par la loi du 10 juillet 1965. En effet, comme le prévoit l’article 8 du décret de 1967, l’assemblée générale peut être convoquée par le syndic. Mais encore faut-il que le mandant du syndic soit valable. Faute de mandat, le professionnel ne pouvait donc pas convoquer une assemblée générale tant qu’il ne disposait pas d’une carte professionnelle valable. 

Cet arrêt est également intéressant du fait qu’il traite de la période COVID. Une des défenses du nouveau gérant était en effet la désorganisation des services de la CCI en période de COVID. Les juges rappelaient que l’article 3 de l’ordonnance du 20 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période avait prorogé les droits des cartes professionnelles venant à échéance entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020, jusqu’au 23 septembre 2020, ce qui n’influait en rien dans le cas de la présente procédure, la période incriminée étant postérieure.