Première décision au fond admettant la perte de la chose louée (C. civ. art. 1722)

par Bastien BRIGNON - Maître de conférences à l’Université d’Aix-Marseille
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bail commercialL’essentiel

Ecartant, comme d’autres avant lui, le jeu de l’exception d’inexécution pour défaut de délivrance, le juge du fond de La Rochelle applique les dispositions sur la perte du bien loué pour dispenser un locataire commercial du paiement des loyers dus à l’occasion du premier confinement.

TJ La Rochelle, 23 mars 2021, RG n° 20/02248

Le commentaire

Alors que les dictionnaires commencent à prendre position sur le genre masculin ou féminin «du» ou «de la COVID», ainsi que sur le fait de savoir si cet acronyme doit être écrit avec ou sans majuscule, les juridictions, des premier et second degrés, du fond, du référé et de l’exécution, continuent de rendre des décisions toutes plus intéressantes les unes que les autres en matière de loyers commerciaux. La question est toujours la même : compte tenu de la crise sanitaire, les commerçants fermés sont-ils dispensés de régler les loyers dus pour la période de fermeture ? Et les arguments, relevant du droit commun des contrats ou du droit commun du bail, sont toujours les mêmes.

L’un des points actuellement les plus débattus est celui de la perte de la chose louée. En effet, nombre de locataires estiment que, sur le fondement de l’article 1722 du Code civil, selon lequel «si, pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit ; si elle n’est détruite qu’en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la résiliation même du bail. Dans l’un et l’autre cas, il n’y a lieu à aucun dédommagement», ils sont dispensés de régler les loyers commerciaux correspondant aux périodes de fermeture de leur magasin. Et nombres de juges leur donnent raison, estimant ainsi que l’impossibilité d’exploiter les lieux loués en raison de la fermeture des commerces pendant le premier confinement est assimilable à la perte fortuite du local prévue par l’article 1722 précité. (TJ Paris, JEX, 20 janv. 2021, RG n° 20/80923, BRDA 4/21 inf. n° 19 ; Ann. Loyers n° 2021-03, p. 67, note B. Brignon. – CA Versailles, 14e ch., référé, 4 mars 2021, RG n° 20/02572, BRDA 7/21, inf. n° 18 ; Ann. Loyers n° 2021-05, p. 69, note B. Brignon).

Article paru dans les Annales des Loyers N° 06 de juin 2021 

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